L’expédition est un voyage d’exploration ou touristique dans un pays difficilement accessible. Un délai de préparation d’un an n’est pas utopique pour faire naitre son projet. Mais alors, comment la préparer ?
POURQUOI ?
La première question que vous devrez vous poser concernera vos motivations.
Vous seul, après une profonde réflexion, pourrez trouver votre motivation intérieure, soyez honnête avec vous-même et gardez toujours cet objectif en tête. En comprenant votre but, vous saurez comment l’atteindre.
OU ?
Très souvent c’est le pays et le biotope qui vous appellent. Mais vous pouvez aussi choisir une destination en lien avec votre projet, qui ait une signification symbolique.
COMMENT ?
Pour une première, ne cherchez pas à faire trop engagé. Fixez-vous au moins un élément de facilité : proximité humaine, absence de difficultés techniques majeures, accompagnement par un professionnel, durée courte, moyen que vous maitrisez (à pied, à cheval, à vélo…). Cet élément sera un point fixe auquel vous raccrocher en cas d’imprévu majeur.
COMBIEN DE TEMPS ?
Tout le monde n’a pas la possibilité matérielle et organisationnelle de partir loin de tout pendant plusieurs mois. Souvent on idéalise, on imagine, on fantasme, on redoute… une fois sur le terrain, rien ne se passe jamais comme prévu !
Cette première expérience sera l’occasion d’affiner et d’aboutir à un plus gros projet. Cependant, sur une durée trop courte, vous ne profiterez pas de l’immersion.
Sur les expéditions de “survie”, dites “survivalisme“ les premières 24h sont décisives : on est encore en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels. Les décisions et l’organisation doivent être prises en amont ou à ce moment.
Les 2/3 jours qui suivent sont les plus durs : nos besoins vitaux ne sont pas encore tous couverts.
A partir du 3/4ème jour, une routine s’instaure si les premières 24h ont été efficaces.
Ensuite on peut profiter de la découverte, l’apprentissage, l’évolution, l’amélioration et l’optimisation de la recherche de ressources. C’est le cœur de l’aventure.
Pour ces raisons, une durée inférieure à 10 jours me semble peu représentative et vous partirez avec une sensation d’inachevé.
AVEC QUI ?
Partir seul(e), surtout pour une première, est une prise de risque. Si vous avez déjà un gros « background » d’autonomie c’est envisageable. Mais partir seul ne veut pas dire être seul. Que ce soit à distance, en France, ou sur place, il vous faudra des contacts réguliers pour assurer votre sécurité.
Partir en équipe peut être rassurant. Attention néanmoins au choix de ses co-équipiers : il faut bien se connaître et surtout avoir identifié les points forts et les points faibles de chacun. Tolérance, bienveillance, esprit d’équipe devront être les maitres mots. La base c’est d’être d’accord sur les objectifs de l’aventure ;
Avec un accompagnateur, vous vous affranchirez totalement de l’aspect logistique. Le budget global ne sera pas plus élevé car votre guide connaît la région et ses écueils et vous bénéficierez d’une économie d’échelle. Par contre vous pourrez être amené à partager l’aventure avec d’autres personnes que vous n’avez pas choisi. A vous de vérifier que les conditions proposées vous conviennent : présence d’un guide, groupe très restreint, individuel ou 25 personnes, circuit totalement sauvage ou parcours balisé…Avant le départ, échangez un maximum avec des personnes ayant vécu une expédition similaire. A l’ère des réseaux sociaux il est facile de contacter des aventuriers, des professionnels du pays, du biotope ou de l’activité sportive que vous envisagez. La plupart vous répondrons avec bienveillance et honnêteté.
La guilde européenne du Raid organise une fois par mois des rencontres autour du thème « les cafés de l’aventure ». Les salons et conférences sont tout autant d’autres occasions de partager les retours d’expérience de chacun.
LE FINANCEMENT
Une fois que le déroulé de votre expédition a sa forme définitive, vous commencerez à envisager la question du financement.
Vous pouvez monter un dossier de sponsoring et demander des financements monétaires, un soutien en équipement ou en service par exemple. Votre dossier devra être clair sur les contreparties que vous offrirez aux entreprises ou aux particuliers qui vous soutiendront dans votre démarche : placement produit, espace publicitaire sur un support visuel ou dématérialisé …
Les grandes marques d’outdoor proposent tous les ans des bourses qui sont remises après sélection de votre dossier par un jury d’experts. Elle sont généralement attribuées 6 à 12 mois à l’avance.
Vous ferez face à de nombreux refus, insistez, persévérez ! Brillez par votre originalité, mettez l’accent sur ce qui vous différencie des dizaines d’autres projets similaires. Des centaines de personnes ont fait des traversées extrêmes de plusieurs milliers de kilomètres à vélos et pourtant on n’a jamais entendu parler d’eux… mais tout le monde se souvient de ce cycliste amateur qui a parcouru 1000 km pour rallier Parla Montcuq. C’est l’originalité de son projet qui l’a rendu célèbre.
ÉVALUATION DES RISQUES
Si vous planifiez de partir en expédition, c’est que vous avez le goût du risque. Repousser ses limites et se mettre en difficulté ne veut pas autant dire partir en insécurité.
Il y a trois types de critères à prendre en compte pour lister les risques :
– Le facteur humain : votre condition physique et psychique, votre niveau technique, votre expérience et votre équipement
– Le facteur météo : prévisions météo, renseignements auprès des locaux
– Le facteur terrain / environnement : faune et flore, terrain, dénivelé, zones accidentées, passages techniques, connaissances personnelles
Après les avoir identifié, catégorisez-les en fonction de leur gravité et leur probabilité : risque élevé, moyen, faible.
C’est à vous de prévoir des plans B et C pour supprimer les risques élevés et diminuer les risques moyens.
A la suite de cette évaluation , vous déciderez si vous pouvez maintenir votre projet comme tel, trouver une/des solution(s) alternative (s), ou l’annuler.
Il faudra aussi penser à vous préparer physiquement et mentalement : connaissance du milieu, compétences, passage chez votre médecin traitant qui vous orientera éventuellement vers der services spécialisés.
ALIMENTATION
Durant cette expédition, avez-vous prévu un ravitaillement ? Serez-vous en autonomie sans assistance ? En autonomie totale sans nourriture ?
Personnellement, comme mes expéditions sont orientées vers l’autonomie en pleine nature, je mange ce que l’environnement m’offre. Je me nourris à 75/80% de pêche, chasse et cueillette sauvage.
Faites vous un tableau avec vos besoins caloriques journaliers. Le principal sera d’avoir un apport calorique et protéique suffisant. Les protéines vous permettent de conserver votre masse musculaire, et les calories gardent le carburant.
A titre d’exemple, Mike Horn avait besoin de 8800kcl/jour en milieu polaire ! soit 1kg de lipides purs ou plus de 2kg de glucides ou de protéines à porter sur soi.
MATÉRIEL
Deux impératifs dicteront vos choix : le poids que vous transporterez et la fiabilité de votre équipement. Choisir des vêtements techniques tels que des vêtements thermorégulateurs. Il faut que vous connaissiez votre matériel par cœur et que vous sachiez l’utiliser les yeux bandés. Vous pouvez par exemple avoir votre sac à dos qui contient l’ensemble des pochettes, et sur vous, un kit de survie de petit format qui reprend l’ensemble des besoins. Si par malheur vous perdez votre sac, votre kit de survie sera votre plan B.
Pour conclure, la préparation, c’est la clé de la réussite de votre expédition.
Pour une première, appuyez-vous sur quelques points de facilité qui vous offriront une sécurité et surtout de la latitude pour évoluer durant votre aventure.
Prévoyez un plan A, un plan B, et un plan C, pour limiter les risques, et apprenez à improviser une fois sur le terrain ! La régression cognitive associée à une condition dégradée ne vous permettra plus de réfléchir une fois en difficulté ; c’est pour cela qu’il est indispensable de planifier des procédures à l’avance.
Soyez réaliste réaliste sur les difficultés et surtout sur vos propres capacités.
Gardez votre objectif et vos motivations profondes en point de mire. C’est ce qui vous tiendra si vous vous retrouvez en situation difficile.
N’ayez qu’une certitude : vous ne savez rien !
Tout peut arriver, surtout ce que vous n’avez pas prévu… c’est ce qui rend l’expédition aussi excitante et addictive !
Texte écrit par Mme Eléonore Lluna, aventurière, pour le salon du survivalisme.